Le parlement français se prononcera, demain, sur l'accord conclu par les chefs d'Etat et de gouvernement de la zone euro concernant la Grèce. A ma connaissance, c'est une première. Si, jusqu'à présent le Parlement a été sollicité sur la ratification des traités, il n'a pas été invité à s'exprimer sur les accords conclus à Bruxelles entre les pays membres de l'Europe. Rien n'oblige, en effet, juridiquement le gouvernement français à le faire, contrairement à la ratification des traités qui suppose un vote du Parlement. L'exécutif engage, seul, la France lorsqu'il négocie avec ses partenaires européens et n'a pas besoin d'une approbation de son Parlement. Rien non plus n'interdit au gouvernement français de consulter les parlementaires, sans doute, sur la base d'une résolution. Celle-ci aura une valeur politique mais ne sera pas contraignante sur le plan juridique. Cela n'enlève rien à la portée de l'initiative du Président de la République et du Premier ministre qu'il faut saluer. L'opacité du processus de décision européen nourrit en effet l'euro-scepticisme. Permettre aux représentants de la nation de se saisir des questions débattues au niveau européen, qui engagent de plus en plus l'avenir du pays, c'est commencer à combler cette fracture démocratique qui s'est installée avec l'Europe. Si l'Allemagne reste relativement épargnée par l'euro-scepticisme c'est peut être en raison du rôle de son Parlement qui est consulté systématiquement lorsqu'il s'agit de questions européennes. C'est aussi un argument que les responsables politiques allemands utilisent dans les négociations européennes, parfois avec un certain opportunisme, pour refuser d'endosser tel ou tel compromis ! Il semblerait que ces consultations nationales des parlements, qui jusqu'à présent étaient l'apanage du Bundestag, se généralisent puisque neuf pays de la zone euro soumettront à leur parlement respectif l'accord sur la Grèce. Certains regretteront cette procédure qui, outre les blocages qu'elle peut générer en donnant à chacun des parlements une sorte de droit de veto, renforce la dimension inter-étatique et non fédérale de l'Union. Cette objection serait recevable s'il était possible, aujourd'hui, de légitimer les décisions prises au niveau de la zone euro par d'autres parlementaires que les parlementaires nationaux! Le parlement européen n'a pas, pour le moment, créé en son sein une formation "zone euro" qui lui permettrait de jouer ce rôle, malgré les préconisations du dernier Conseil européen. En outre, il n'est pas illégitime que des engagements budgétaires directs des États, comme c'est le cas pour l'aide à la Grèce, soient contrôlés par leurs représentants nationaux. En consultant le parlement français le gouvernement ne prend, en définitive, que le risque de créer un précédent !