Je présenterai jeudi 30 janvier en séance plénière une résolution sur l’Union bancaire et l’Union économique. L’Assemblée nationale sera donc appelée à définir sa position sur deux sujets majeurs de la gouvernance économique de l’Union. Elle délibérera à un moment particulièrement opportun puisque l’Union bancaire fait l’objet d’une discussion vive entre le Parlement européen, le Conseil Européen et la Commission dans le cadre de ce que l’on appelle dans le jargon bruxellois le « trilogue ». Dans ce contexte, la position de l’Assemblée nationale sera regardée avec attention, comme j’ai pu le constater la semaine dernière à Bruxelles lors de la semaine interparlementaire réunissant le Parlement européen et les Parlements nationaux sur les questions budgétaires et financières.
La première partie de cette résolution portera donc sur l’Union bancaire. Au-delà de la satisfaction de constater que le Conseil Européen est parvenu à un accord sur un sujet qui divisait beaucoup les Etats, on peut juger cet accord comme très insuffisant au regard des enjeux et de la proposition initiale de la Commission Européenne. Il faut donc soutenir le Parlement Européen dans sa volonté d’améliorer ce compromis.
L’Union bancaire vise à prévenir et à traiter les crises bancaires. Elle comporte trois piliers qui doivent apporter une réponse opérationnelle à la faillite d’une banque. Le premier est la supervision, c’est-à-dire la surveillance. Celui-ci a été traité dans un accord précédent de manière satisfaisante. La supervision a été confiée à la BCE qui a commencé son travail. L’objectif est de prévenir les défaillances bancaires et d’alerter en cas de problème. Le deuxième pilier est la résolution. Il s’agit de mettre en place un dispositif qui permette d’éviter que la faillite d’une banque ne menace le système bancaire et impacte les finances des Etats. C’est ce point précis qui a fait l’objet d’un accord au Conseil Européen de la fin de l’année dernière. Enfin, le troisième pilier est constitué par « la garantie des dépôts » c’est-à-dire par la mise en place de mesures destinées à rembourser les déposants dont la banque ferait faillite, au moins jusqu’à 100 000 euros. L’objectif est d’éviter un « bank run », c’est-à-dire que les déposants se précipitent pour retirer leurs dépôts en aggravant la crise de la banque. Ce pilier est essentiel, mais il est, pour le moment au point mort.
Ces négociations sont longues et difficiles car un certain nombre de pays rechignent à mutualiser au niveau européen les financements nécessaires ou/et souhaitent garder une capacité de décision concernant leurs propres banques. En matière de résolution, la Commission européenne avait proposé un système satisfaisant. Si le renflouement interne, fixé par un appel ordonné des créanciers et des déposants, à l’exception des dépôts inférieurs à 100 000 euros, ne suffit pas, alors la banque peut faire appel à un fonds européen de résolution constitué par des contributions des banques européennes. La décision d’activer ce fonds serait prise par un Conseil de résolution et in fine par la Commission européenne. L’accord conclu au sein du Conseil Européen a complexifié ce dispositif au-delà du raisonnable.
Concernant le fonds tout d’abord, celui-ci ne sera pas mutualisé d’emblée, mais comportera des compartiments nationaux qui seront fusionné progressivement au bout de dix ans. S’agissant de la décision, celle-ci appartiendra au Conseil de résolution suivant des règles de vote très complexes. Mais, le Conseil Européen et non plus la Commission, pourra se saisir de la décision en dernier ressort. Dans les faits, les Etats garderont la main sur les décisions d’activation du fonds, avec toutes les interférences que cela suppose avec les intérêts nationaux qui, dans ce domaine, ne sont pas opportuns. Enfin, le Conseil Européen a été incapable de s’entendre sur la création d’un « backstop » public qui garantisse le système lorsque tous les dispositifs ont été épuisés.
C’est sur ces points que la résolution demande que le compromis soit amélioré et revienne à la proposition élaborée par la Commission européenne qui avait le mérite d’être claire et efficace. En outre, la résolution insiste sur la nécessité d’associer les Parlements nationaux au contrôle de cette Union bancaire, par l’accès à certains documents et la capacité d’auditionner les principaux responsables.
La deuxième partie de la résolution porte sur la gouvernance budgétaire et économique. L’urgence est moins grande à traiter cette question car le Conseil Européen l’a renvoyée au mois d’octobre, faute d’accord complet. Dans ce domaine, la discussion porte sur ce que l’on appelle les « arrangements contractuels ». Il s’agit d’accompagner les réformes dans les pays de la zone euro, en particulier, par des incitations financières. En soi l’idée n’est pas inintéressante, car il est difficile de demander aux pays concernés de réduire leurs déficits et, en même temps, d’opérer des réformes difficiles qui menacent leur cohésion sociale. En outre, ces arrangements pourraient préfigurer la création d’un budget de la zone euro qui viendrait épauler les pays en déficit et soutenir l’économie. Mais ce n’est manifestement pas la conception allemande, qui envisage ces arrangements comme un instrument supplémentaire de discipline.
Pour l’Allemagne, ces arrangements seraient juridiquement contraignants, imposés aux Etats par la Commission Européenne dans le cadre du semestre européen, sans que ne soient définies de manière précise les contreparties financières. Cette conception a soulevé un tollé au dernier Conseil Européen.
Il a donc été décidé que ces arrangements seraient établis « d’un commun accord », et qu’un mécanisme de solidarité financière qui reste à définir, y serait associé. C’est cette conception que développe la résolution.