J’ai signé, avec de nombreux collègues socialistes, une tribune que le journal Le
Monde publie aujourd’hui, lundi 17 septembre, pour affirmer notre attachement au droit de vote des étrangers aux élections locales. Cette proposition, qui figure dans les programmes
socialistes depuis 1981 et que l’actuel Président de la République a porté durant la campagne présidentielle doit, en effet, être inscrite à l’agenda de la mandature. Je n’évoquerai pas les
raisons, bien connues, qui justifient cette réforme, à laquelle la gauche, dans son ensemble, est attachée. La question n’est pas tant son bien-fondé que sa mise en œuvre. Une nouvelle fois, les
obstacles semblent se dresser sur son chemin. Verra t-on l’application de cette mesure à nouveau différée ? Les indications, certes officieuses, qui viennent du plus haut sommet de l’Etat le
laissent à penser. Il convient, donc, d’examiner les arguments qui plaident pour cet ajournement.
L’un est juridique ; la gauche ne disposerait pas de la majorité des trois cinquième pour
faire adopter la modification de la Constitution que nécessite cette réforme. Comme il n’est pas souhaitable d’engager un référendum sur cette question, avis que je partage, celle-ci n’a aucune
chance d’aboutir. A y regarder de près, cet argument n’est pas totalement convaincant. La majorité ne représente, certes pas, trois cinquième du Parlement, mais n’en est pas très éloignée. En
effet, sur 925 députés et sénateurs, la gauche stricto sensu compte 523 membres. Il faudrait qu’elle en dénombre 555 pour disposer des trois cinquième. Il manque donc 32 députés et sénateurs. Ce
n’est pas rien, mais ce n’est pas insurmontable. On peut penser, en effet, que certains membres de l’opposition se retrouvent dans cette proposition. En tous les cas, cela mérite d’être vérifié.
Il ne serait pas compréhensible que le gouvernement ajourne cette réforme sans avoir ouvert, au préalable, une consultation auprès des parlementaires pour s’assurer ou non de l’existence d’une majorité permettant de la voter.
L’autre argument est politique ; il ne serait pas souhaitable d’inscrire cette réforme à
l’ordre du jour dans le contexte de "crispation" identitaire que connaîtrait notre pays. Cet argument n’est pas recevable, car il nous conduit à intérioriser à l’excès la pression que fait peser
sur le débat public les partis les plus extrêmes. Autant le gouvernement doit se montrer ferme vis à vis de l’intégrisme religieux en contrôlant notamment les conditions dans lesquelles
s’exerce, sur notre territoire, le culte musulman ; autant il ne doit se priver d’aucun outil favorisant l’intégration des populations étrangères. En outre, considérer que le contexte politique
et plus généralement sociétal n’est pas favorable à cette réforme, aurait du conduire à ne pas la proposer durant la campagne électorale !
Pour toutes ces raisons, je souhaite que le gouvernement se donne les moyens de mettre en œuvre une
proposition attendue depuis de nombreuses années.
" Le droit de vote des
étrangers aux élections, c'est maintenant" - Le Monde